Rencontre avec l'ex-Spice Girl et femme de footballeur, reconvertie en talentueuse styliste
Photo Greg Williams
On connaissait son passé de pop star rescapée des années 90, son union surmédiatisée avec l’idole du football britannique. On la découvre styliste douée, reconnue par ses pairs, et jeune femme pétillante, bien loin de la célèbre moue affichée sur les tapis rouges du monde entier. Interview complice.
Queen Victoria ! C’est le nouveau surnom que la presse britannique lui a donné depuis qu’un récent classement des femmes les plus influentes du Royaume-Uni l’installe en deuxième position, juste devant la reine Élisabeth II et derrière l’indétrônable J. K. Rowling. Conclusion immédiate : la Spice Girl des années 90, méprisée des rock critiques intégristes, adepte des combinaisons en latex et des
platform shoes, a réussi sa métamorphose au delà de toute espérance. À 37 ans, « Posh », idole popu, est devenue Victoria Beckham, la grande classe, une des femmes les plus scrutées du monde. Son palmarès est étourdissant : épouse de footballeur star (David, pour ne pas le nommer, qu’elle a eu le talent de garder... Un power couple qui a eu l’intelligence de « marketer » son image et son amour), heureuse maman de quatre beaux enfants, meilleure amie des stars et de la jet-set, créatrice de mode à succès et... dix-neuvième fortune du Royaume-Uni. Avec un tel cursus, on s’attendrait à rencontrer une de ces souveraines show-biz despotiques à la Madonna, une diva
« control freak » à tendance névrotique, et... il n’en est rien : cette jeune femme est adorable.
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Entre famille et entreprise
Le jour de la séance photo pour
Madame Figaro, miss Beckham arrive moulée dans un pantalon pattes d’éléphant Balmain, une veste vintage noire en fausse fourrure et un chapeau Lanvin vissé sur la tête. Pas de sac griffé à l’horizon. À la place, son inséparable « mini-moi » tout de Bonpoint vêtue : sa fille de 7 mois, Harper Seven. Inutile de chercher une horde de paparazzis, quinze gardes du corps et dix assistantes supposés entourer vingt-quatre heures sur vingt-quatre ce trésor national britannique. Victoria B. est venue en petit comité, simplement accompagnée de son
bodyguard aux faux airs de Jason Statham et d’Emily, sa gouvernante californienne. Polie et pudique, elle salue discrètement l’ensemble du staff, confie sa jolie poupée à sa nounou et fonce jeter un œil (super aiguisé) sur la sélection mode du jour. Verdict ?
« I love it! » Voilà une journée qui commence bien, mais qui passera à la vitesse de l’éclair. Pas le temps de s’attarder. L’heure est au maquillage. Et c’est sans sourciller (et sans fard) que Victoria la victorieuse se prête alors au jeu des questions-réponses. Sa love story avec David, le succès fulgurant de sa griffe, l’arrivée de Harper Seven dans la famille, leur non-installation à Paris..., elle se livre sans langue de bois, avec une spontanéité et une simplicité tout à son honneur. Comble du comble, la jeune femme est drôle, pétillante et pleine d’esprit.
Madame Figaro. – Que faites-vous à Londres avec Harper Seven, seules sans vos hommes ?Victoria Beckham. – Nous sommes venus tous ensemble pour les vacances, mais au moment de rentrer, j’ai dû rester pour des raisons professionnelles. David et les garçons sont donc repartis sans nous à Los Angeles. Cela arrive assez souvent, c’est le prix à payer pour mener à bien ma « petite entreprise ». Nous avons hâte de nous retrouver.
Comment votre époux réagit-il quand vous lui annoncez que vous ne pouvez pas rentrer avec lui ?
C’est un vrai papa poule, paraît-il... Il est super ! J’ai le mari le plus compréhensif de la terre. Il ne met aucune pression sur mon emploi du temps. Il sait que mon travail est important pour moi, alors au lieu de me faire culpabiliser ou de ronchonner, il trouve des solutions et joue son rôle de père à cent pour cent. Je possède un atout de taille : David est un passionné. Il respecte aussi mon engagement pour la mode !
Icône de mode, vous avez la possibilité de porter les griffes de votre choix. Pourquoi avoir ressenti le désir de créer votre propre label – Victoria Beckham – en septembre 2008 ?
Tout simplement parce que je ne trouvais pas vraiment ce que je voulais. Alors je me suis dit : pourquoi pas ? Avec le temps, je me suis forgé une véritable culture mode. J’ai beaucoup d’amis designers, dont Marc Jacobs ou Christopher Bailey, qui m’ont soutenue, épaulée et conseillée. Je ne suis pas du genre à reculer devant les difficultés : je me suis lancée tête baissée
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À la conquête de la mode
En novembre dernier, vous avez reçu un oscar de la Mode aux British Fashion Awards. Vous êtes désormais une designer émérite reconnue par ses pairs. Comment le vivez-vous ?
Je suis très fière. J’ai travaillé comme une forcenée pour arriver là où j’en suis aujourd’hui. J’ai la chance d’être entourée d’une petite équipe formidable installée à New York et à Londres. Nous réfléchissons beaucoup à la qualité du produit – de la coupe au choix du tissu. Rien n’est laissé au hasard. Chaque pièce est d’une qualité irréprochable. Je suis ma première critique, j’ai un degré d’exigence très élevé. Cette quête de la perfection demande énormément d’énergie, de sacrifices et d’engagement.
Parvenez-vous à prendre le temps de savourer cette reconnaissance ?
Pas vraiment. Je fais partie de ces éternels insatisfaits qui visent toujours plus haut. Être reconnue entraîne encore plus de pression : il ne faut pas s’écrouler..., on vous attend au tournant. Je passe donc mon temps à me remettre en question, encore et encore. Je suis en compétition permanente avec moi-même. C’est parfois éreintant.
En tant que designer, comment vivez-vous les fameuses veilles de défilé ?
C’est un cauchemar ! Bien que tout soit fin prêt, je suis ultra-stressée, tendue, sur les nerfs. Je suis une grande superstitieuse, alors je ne quitte pas mes pierres de cristal, mon porte-bonheur. Pour le moment, elles ont plutôt bien rempli leur mission...
Où puisez-vous votre inspiration ?
Je dessine et j’imagine ce que j’aime. Je traduis mes envies du moment et j’écoute mon instinct. J’ai un profond respect pour la femme. J’aime l’idée de la sublimer, de lui donner confiance en elle. À travers mes créations, je veux lui donner ce supplément de pouvoir.
Sarah Jessica Parker et Cameron Diaz font partie de vos clientes...
Oui, et j’en suis très fière. Je suis toujours très excitée de voir quelqu’un porter ce que je fais, que ce soit Cameron ou une inconnue. L’autre jour, j’ai dessiné une robe pour Oprah Winfrey, j’étais tellement intimidée de travailler pour cette femme. C’était une expérience formidable.
Vous venez tout juste de lancer une autre ligne baptisée « Victoria, Victoria Beckham ». Quel en est le fil conducteur ?
C’est une ligne beaucoup plus cool, moins sophistiquée. J’ai voulu montrer l’autre facette de mon dressing : je ne passe pas mes journées en robes graphiques et « over-fittées » ! Alors que la ligne principale est entièrement fabriquée à Londres, celle-ci est conçue en Europe, ce qui me permet de produire en plus grande quantité et de pouvoir proposer une mode plus accessible.
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“La femme française m’intrigue beaucoup”
Comment définiriez-vous la Beckham touch ?
Je fais en sorte que chacune de mes créations soit flatteuse. Cela peut se lire dans une coupe, le tombé d’un tissu, le mouvement d’un drapé..., peu importe. J’aime voir le vêtement comme une mise en valeur.
Qui serait la meilleure ambassadrice de votre marque... à part vous ?
Sans aucune hésitation, Carine Roitfeld. Elle a un sens du style incroyable, elle fait partie de ces femmes chic de manière complètement spontanée et naturelle. Quand elle entre dans une pièce, on ne voit qu’elle, elle a une présence impressionnante. Quand je pense qu’elle va bientôt être grand-mère ! Elle va être la grand-mère la plus sexy au monde, non ?
Que pensez-vous de la femme française en général ?
Elle m’intrigue beaucoup. Elle est de loin la femme la plus chic au monde. Elle a ce petit truc en plus qui fait la différence. Elle est toujours ultra-lookée mais sans ostentation. Elle me donne l’impression de vieillir en beauté, sans tous les artifices propres à la chirurgie esthétique.
Vieillir vous effraie-t-il ?
Pas vraiment. C’est quelque chose contre quoi on ne peut pas lutter, alors il faut faire en sorte que ça se passe en douceur. L’important à mes yeux est de ne jamais vouloir faire plus jeune que son âge. Ma devise ? Toujours être en accord avec soi-même ! En accord avec son âge, son style, ses convictions... En revanche, à nous de nous entretenir le mieux possible.
Quelles sont vos astuces dans ce domaine ?
Je mange très équilibré. Beaucoup de légumes de saison et de poissons. En cas de coup de pompe, je bois des litres de Coconut Water. Et puis, je vais copier Carine Roitfeld, qui fait beaucoup de barre au sol. Elle a d’ailleurs promis de m’offrir une paire de chaussons de danse pour que je m’y mette. Dès que je la reçois, je me lance !
Comment se passe la vie à Los Angeles ? Êtes-vous devenue la parfaite L.A. girl ?
Je suis restée
British dans l’âme, mais je dois admettre que la vie à L.A. est douce. Le soleil à temps plein est une option assez plaisante. La semaine, on reste dans notre maison de Malibu ; le week-end, on joue évidemment au football en famille ou on part faire du ski à quarante-cinq minutes d’avion de L.A. Là-bas, tout est possible.
Recevez-vous beaucoup chez vous ? Les médias vous disent très proches de Tom Cruise et Katie Holmes, entre autres...
Oui, c’est vrai, ils font partie de nos amis proches, mais j’ai également copiné avec beaucoup de mamans rencontrées à l’école. D’ailleurs, quand nous recevons, j’adore mélanger les personnes : il y a des footballeurs, des acteurs, des personnalités de la mode et d’autres complètement inconnues.
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Les Beckham dans l'intimité
Qui cuisine chez les Beckham ?
Heureusement pour tout le monde... je ne cuisine pas. David se débrouille très bien. Quand il était joueur au Milan AC, il en a profité pour prendre des cours de cuisine italienne. Il est devenu un professionnel du risotto, de la pasta ! Généralement, je m’occupe de la musique. En ce moment, je suis très musique française
old school. J’écoute les vieux tubes de Brigitte Bardot en boucle.
Êtes-vous la party girl qu’on imagine ?
Pas vraiment. Sauf si j’ai abusé du saké pendant la soirée...
Depuis l’arrivée de Harper Seven, vous n’êtes plus la seule femme de la famille...
Effectivement, et c’est formidable. Elle est très douce, et ses frères l’adorent. Elle a tout de suite trouvé sa place dans la famille. J’aime beaucoup l’idée qu’elle puisse un jour me regarder comme les garçons regardent David... Quand je dessinais ma ligne « Victoria, Victoria Beckham », elle était encore dans mon ventre. Je suis sûre qu’elle a influencé mon travail : pendant ma grossesse, j’avais envie de choses légères, d’imprimés rigolos... J’adore aussi l’idée de lui transmettre mes belles pièces. Je conserve tout précieusement pour ma fille.
Il semblerait qu’elle ait reçu le sens du style en héritage. Du haut de ses 7 mois, elle est déjà une modeuse émérite !
Elle a un dressing mille fois plus fourni que le mien ! Je prends un plaisir fou à l’habiller. J’aime qu’elle soit chic. Je n’aime pas du tout les bébés déguisés en adultes ou, à l’inverse, transformés en bonbons rose flashy. Je trouve ça vulgaire. J’aime la sobriété : une paire de collants et une petite robe bon chic bon genre, c’est tellement plus mignon.
Est-il vrai que vous envisagez de créer une ligne pour enfant ?
Pas du tout. Ça fait partie des aberrations que la presse peut parfois publier. D’autres le font déjà très bien. Je suis une fan inconditionnelle de Bonpoint et de Bonton. Je pourrais tout acheter.
Vous êtes ultra-perfectionniste dans le travail. Quelle mère êtes-vous ?
Très attentive et assez stricte aussi. Nous veillons à ce qu’ils aient de bonnes manières. Le respect de l’autre est essentiel. En termes de politesse, nous ne lâchons rien. Nous sommes une famille très soudée, nous faisons tout ensemble. David et moi ne sortons pas pour rester avec eux. On parle de tout. On s’amuse beaucoup.
Dans les magazines, on vous voit beaucoup conduire vos enfants à l’école...
Oui, et je revendique cette implication. Régulièrement, je prends Harper Seven sous le bras et nous filons à l’école des garçons pour servir les repas. L’autre jour avec David, nous avons même animé le English Day dans la classe de Roméo. Nous sommes arrivés avec du thé, des drapeaux, des gâteaux et de la musique typiquement anglais. L’Angleterre ? Les enfants étaient éberlués quand nous leur avons montré notre invitation au mariage royal... Puis David a entonné l’hymne national. Un grand moment de rigolade pour moi... et de solitude pour lui !
Photo Greg Williams
Les projets de Victoria
Devons-nous comprendre que les enfants sont la principale raison de votre non-venue à Paris ?
En partie, oui ! Ils sont si bien à Los Angeles. Ils se sont fait des dizaines de petits copains, ils ont leurs repères, ils se sont bien intégrés... Nous imaginions mal remettre tout ça en question. J’adore Paris, mais... le soleil de la Californie peut être addictif.
Vous êtes en permanence suivie par une horde de paparazzis. S’y habitue-t-on ?
Plus je vieillis, moins je les supporte. Tout ce tralala me met mal à l’aise. Je ne suis plus la
red carpet girl que j’étais autrefois. Je ne demande qu’à faire mon travail de designer dans la discrétion. Les lunettes de soleil XXL et la moue légèrement boudeuse : voilà ma façon de me protéger. Je sais que cela donne une image assez caricaturale de moi, mais tant pis.
Quel est votre rêve ultime ?
J’adorerais voir le monde à travers les yeux de Miuccia Prada ! Cette femme est un génie. Sa vision de la mode est ultra-intelligente. À chaque saison, elle sait se renouveler, elle sait surprendre. Je ne la connais pas. La rencontrer serait un honneur !
Plus je vieillis, moins je supporte les paparazzis
Son idée de la mode
Vos fashion icônes ?
J’aime beaucoup le style de Kate Bosworth et celui de Clémence Poésy. Cette fille m’obsède. Je la trouve très intéressante.
Ce que vous ne porterez jamais...Vous ne me verrez jamais dans la rue en survêtement. J’aime trop la mode pour céder à l’appel du survêtement ! Idem pour les UGG : elles sont cantonnées à la maison !
Un dressing à dérober...Sans hésiter, celui de Tilda Swinton. J’adore la façon dont elle s’habille. Cette fille a tout compris à la mode. Elle donne l’impression de toujours avoir une vraie confiance en elle. J’aimerais beaucoup l’habiller.
Dernier achatUne paire de sandales vert menthe, signée Prada, en accord parfait avec les tonalités de l’été à venir.
Fashion addictionsJe suis accro à Prada, aux cardigans et aux sacs Hermès. Mon truc ? Traquer les Kelly et Birkin millésimés dans les ventes aux enchères.
Un bon plan shoppingJe suis une inconditionnelle de
Net-a-porter.com. Dès que les enfants sont couchés, je peux y surfer des heures. J’aime l’idée d’essayer tranquillement chez soi et de pouvoir renvoyer si ça ne va pas. C’est la liberté absolue.
source: Madame Le Figaro